Maroc–Algérie : pour une réconciliation lucide et durable

Bouchaib El Bazi

Le discours prononcé par Sa Majesté le Roi Mohammed VI à l’occasion de la Fête du Trône, dans sa 26e édition, s’est à nouveau inscrit dans une logique d’ouverture résolue vis-à-vis de l’Algérie. En appelant à un dialogue « franc, direct et responsable », le Souverain marocain réitère une position constante : celle d’un Maroc prêt à dépasser les malentendus historiques pour bâtir, avec son voisin de l’Est, un avenir commun fondé sur la coopération et la confiance mutuelle.

Un appel qui dépasse le protocole

Loin d’un simple exercice diplomatique, cet appel s’inscrit dans une trajectoire politique claire. Depuis plusieurs années, la position marocaine se caractérise par une volonté de dépasser l’état de gel bilatéral. La main tendue du Roi n’est pas une posture de circonstance, mais l’expression d’un engagement institutionnel, enraciné dans la vision d’un Maghreb rassemblé autour des intérêts partagés plutôt que des antagonismes hérités.

Dans un monde traversé par des recompositions profondes – qu’il s’agisse des équilibres énergétiques, des tensions géopolitiques ou des défis climatiques – il devient évident que les divisions intra-maghrébines constituent un véritable handicap collectif.

La normalisation : une exigence, non une faveur

La normalisation des relations entre Rabat et Alger ne saurait être perçue comme un geste de concession, mais bien comme une nécessité stratégique. Les deux pays partagent une histoire millénaire, des frontières humaines vivantes, des défis structurels communs. Qu’il s’agisse de la sécurité des frontières, de la gestion des ressources en eau, de la lutte contre les trafics ou encore des aspirations économiques de leur jeunesse, aucun de ces enjeux ne peut être résolu dans l’isolement.

L’architecture du Grand Maghreb, imaginée dans les années 1980, reste à ce jour un projet inabouti. Et pour cause : les blocages politiques, alimentés par des querelles doctrinales, ont empêché toute dynamique d’intégration régionale. Aujourd’hui, cette situation nuit aussi bien aux performances économiques qu’à la stabilité géopolitique de la région.

L’Algérie face à ses choix

Le silence persistant du pouvoir algérien face aux ouvertures marocaines traduit une difficulté à sortir d’un schéma de confrontation hérité de la guerre froide. L’obsession de l’ennemi extérieur et le recours au nationalisme rigide comme outil de légitimation interne ont fini par enfermer la diplomatie algérienne dans une impasse. Pourtant, les signaux internationaux sont clairs : la communauté internationale tend à soutenir des approches pragmatiques, stables et orientées vers la coopération.

Le projet marocain d’autonomie au Sahara, largement soutenu par de nombreuses puissances, illustre cette dynamique. Refuser de dialoguer, persister dans l’hostilité, revient non seulement à se marginaliser sur la scène internationale, mais aussi à ignorer les attentes d’une grande partie de la population algérienne, lassée des tensions et désireuse d’ouverture.

L’avenir, un espace à conquérir ensemble

Le discours royal ne se limite pas à une exhortation morale. Il pose les bases d’un possible nouveau départ : une relation apaisée, constructive, basée sur la réciprocité et la lucidité. Dans cette perspective, la réconciliation entre le Maroc et l’Algérie ne serait pas un retour au passé, mais une projection vers l’avenir. Elle offrirait aux deux peuples les conditions d’un progrès partagé, d’une souveraineté renforcée, et d’un rayonnement maghrébin rénové.

Il appartient désormais aux élites algériennes de saisir cette opportunité. Le moment est venu de substituer la défiance par le dialogue, le calcul politique par l’intérêt des peuples, et l’histoire figée par un futur en commun.

 

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