Saliha Rais ou l’art de répondre à la haine avec franchise

Bouchaib El Bazi

Quand une élue prend la parole pour dénoncer l’injustice et défendre la dignité de toute une communauté, certains y voient une provocation. D’autres, plus lucides, reconnaissent enfin le courage politique. C’est exactement ce qui s’est produit lorsque Saliha Rais a osé dire, au conseil communal , « Ceux qui sont gênés par le voile n’ont qu’à dégager. »

Une phrase qui a fait trembler les réseaux sociaux, où les partisans du Mouvement Réformateur (MR) se sont empressés de tirer à boulets rouges. Pas sur ses idées, mais sur son identité. Les attaques étaient d’une rare violence , qualificatifs islamophobes, insultes racistes, dénigrements personnels. Bref, le répertoire classique de ceux qui préfèrent stigmatiser plutôt que débattre.

Et il faut le dire , Molenbeek et ses habitants sont depuis longtemps la cible favorite du MR. La commune est régulièrement utilisée comme un épouvantail politique, caricaturée comme un repaire de délinquants ou d’extrémistes. En réalité, c’est une commune dynamique, multiculturelle, où la majorité vit, travaille et construit la Belgique d’aujourd’hui. Mais pour certains stratèges politiques, taper sur Molenbeek reste le moyen le plus facile de séduire un électorat inquiet.

C’est dans ce contexte que s’inscrit la sortie de Saliha Rais. Quand une élue, d’origine marocaine et naturalisée belge, ose dire « stop » à l’instrumentalisation du voile et à la stigmatisation permanente de sa commune, elle ne fait que traduire la lassitude de milliers de citoyens.

Certes, le mot « dégagez » peut choquer. Mais que vaut un mot face à des décennies de propos racistes, de regards méprisants et de campagnes islamophobes ? Le vrai scandale n’est pas dans sa phrase, mais dans le silence coupable de ceux qui prétendent défendre l’égalité tout en laissant prospérer la haine.

Les responsables politiques interrogés sur cette affaire ont, pour la plupart, préféré détourner le regard. Peur de déplaire à leur électorat ? Peur d’être accusés de complaisance ? Leur lâcheté est un aveu , le racisme et l’islamophobie continuent de gangréner le débat public, mais peu osent les nommer.

Quant à ceux qui s’indignent de voir une élue « d’origine étrangère » oser s’exprimer avec fermeté, rappelons une évidence , être belge, ce n’est pas une question de sang, mais de citoyenneté et de valeurs. Saliha Rais a été élue démocratiquement. Elle a donc toute légitimité pour parler haut et fort, y compris contre ceux qui rêveraient de la réduire au silence.

En définitive, sa sortie n’était pas une provocation gratuite, mais une réponse claire à la haine ordinaire et aux attaques répétées contre sa commune. Elle a eu le mérite de mettre en lumière ce que beaucoup taisent , le racisme n’a pas disparu, il se cache dans les discours policés et explose sur les réseaux sociaux.

Et si le vrai mot d’ordre en politique était enfin : « Refusez la haine, avant qu’elle ne détruise la société » ?

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