Coupe du monde 2030 : le Maroc prépare des réformes judiciaires inédites pour encadrer l’événement
Bouchaib El Bazi
Rabat – À quatre ans de la Coupe du monde 2030, que le Maroc coorganisera avec l’Espagne et le Portugal, le ministre marocain de la Justice, Abdellatif Ouahbi, a annoncé une série de réformes visant à adapter le système judiciaire aux défis de cet événement planétaire.
Parmi les mesures phares figure la création de commissions judiciaires dans les stades, présidées par des procureurs et travaillant en étroite collaboration avec les autorités sécuritaires. Objectif , traiter sur place les éventuelles infractions liées au comportement des supporters et éviter d’encombrer inutilement les tribunaux.
Anticiper un afflux inédit de visiteurs
Le Maroc s’attend à accueillir 26 millions de touristes en 2030, contre 17,4 millions en 2024. Un afflux massif qui nécessitera une adaptation institutionnelle et logistique, au-delà des infrastructures sportives et urbaines.
« La Coupe du monde ne doit pas seulement être une fête du football, mais aussi une vitrine des réformes judiciaires et de la modernisation de notre système légal », a déclaré Ouahbi, soulignant que le Royaume s’inspire de précédents internationaux, notamment des Jeux olympiques récents et des dernières Coupes du monde.
Une coopération judiciaire renforcée avec l’Espagne et le Portugal
Le ministre a annoncé la signature prochaine d’un accord de coopération judiciaire tripartite entre Rabat, Madrid et Lisbonne. Ce mécanisme prévoit la facilitation des procédures d’extradition, de transfert de détenus et d’entraide juridique. Une mesure jugée nécessaire pour garantir la fluidité du traitement des affaires impliquant des ressortissants étrangers.
Réformes structurelles et alternatives aux peines de prison
En parallèle, le Maroc révise actuellement son code de la famille et son code pénal, avec l’introduction d’alternatives aux peines privatives de liberté, telles que le port du bracelet électronique. Une réforme motivée par la volonté de limiter la surpopulation carcérale, largement liée au recours élevé à la détention préventive.
La question sensible de l’alcool
L’un des points les plus délicats concerne la consommation d’alcool dans les zones réservées aux supporters. Tout en rappelant que l’alcool reste en vente au Maroc mais que sa consommation dans l’espace public est interdite, Ouahbi a précisé que des discussions sont en cours pour définir des cadres réglementaires adaptés aux pratiques internationales, avec la possibilité d’autoriser la consommation dans des espaces spécifiques, sous conditions strictes.
Un dispositif judiciaire multilingue et spécialisé
Les réformes envisagées incluent également la mise en place de centres judiciaires multilingues destinés à accompagner les visiteurs étrangers, ainsi que des formations spécialisées pour les magistrats dans les domaines du sport, du tourisme et de la médiation. Le but est de promouvoir le recours aux modes alternatifs de règlement des litiges, afin de désengorger les juridictions ordinaires.
Une modernisation à l’image des infrastructures
Ces réformes judiciaires s’ajoutent aux investissements massifs dans les infrastructures sportives, ferroviaires, aéroportuaires et hôtelières, déjà annoncés dans le cadre des préparatifs. Le Maroc mise sur cet événement non seulement pour renforcer son image internationale mais aussi pour accélérer des réformes de fond.
Une édition historique
La Coupe du monde 2030 sera la 24e édition organisée par la FIFA. Elle se tiendra pour la première fois dans trois continents et six pays, avec un clin d’œil historique , les trois premiers matchs se joueront en Uruguay, en Argentine et au Paraguay, pour marquer le centenaire de la compétition. Elle sera également la deuxième édition à accueillir 48 équipes nationales, après celle de 2026.
« Le Mondial 2030 ne sera pas seulement un rendez-vous sportif, mais un signal politique et institutionnel , celui d’un Maroc moderne, ouvert et résolument tourné vers l’avenir », a conclu le ministre Ouahbi.