Bruxelles : quand la peur devient un spectacle sponsorisé

Majdi Fatima Zahra

Le 17 septembre 2025, le Birmingham Event Center d’Anderlecht s’est transformé en scène de théâtre politique. À l’affiche, un titre digne d’une affiche de série Netflix  « Quelles mesures face aux Frères musulmans ? ». Rien que ça. On aurait presque attendu une bande-annonce dramatique avec musique angoissante et gros plans sur des barbes menaçantes.

À défaut de suspense, la conférence a offert au public un casting bien rôdé , journalistes en croisade, chercheurs en mission et politiciens en mal de tribune. Tout ce beau monde, sous l’étendard du Centre Jean Gol, est venu expliquer à la Belgique entière que le véritable danger pour la démocratie se cache… dans les mosquées du coin.

On retrouve les habitués , Mohamed Sifaoui, qui semble avoir fait des « réseaux islamistes » son fonds de commerce permanent ; Florence Bergeaud-Blackler, dont les ouvrages servent de manuels aux chasseurs d’épouvantails ; et bien sûr Marc Uyttendaele, constitutionnaliste à géométrie variable, qui nous rappelle que la laïcité est en danger… sauf quand il s’agit de stigmatiser une seule religion.

Et pour pimenter le spectacle, deux figures politiques s’invitent , Georges-Louis Bouchez, champion toutes catégories du coup médiatique, et Denis Ducarme, qui semble avoir trouvé dans la lutte contre l’« islamisme » son nouvel uniforme de combat. Résultat : un mélange de slogans martiaux et de discours dramatisés, qui ferait presque oublier les vrais problèmes du pays – inflation, logement, climat, jeunesse en déshérence – mais qui a le mérite d’offrir un bon show pour les caméras.

Car au fond, de quoi s’agit-il ? De parler d’intégration ? Non. D’échanger avec des citoyens belges de confession musulmane ? Encore moins. Il s’agit de désigner un ennemi intérieur, d’ériger le musulman en suspect permanent, et de recycler l’éternel fantasme de « l’infiltration des Frères musulmans » pour nourrir une peur collective.

Ce genre d’événement n’a rien d’un débat démocratique , c’est une mise en scène politique qui confond sécurité et idéologie, laïcité et croisade, critique et stigmatisation. Bref, un concentré d’islamophobie savamment emballée dans un discours pseudo-académique.

À force de monter en épingle l’« ennemi musulman », on finit par oublier une évidence , les musulmans de Belgique sont avant tout… des citoyens belges. Ils paient leurs impôts, votent, travaillent, et n’ont pas demandé à être transformés en menace nationale pour nourrir la carrière de quelques politiciens en quête de buzz.

Au lieu de poser la question « Quelles mesures face aux Frères musulmans ? », peut-être faudrait-il se demander , quelles mesures face à l’islamophobie décomplexée qui, sous couvert de défendre la République, fragilise le vivre-ensemble ?

 

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