La génération Z secoue le Maroc : entre malaise social, réponses sécuritaires et besoin urgent de réforme

Bouchaib El Bazi

La capitale marocaine, Rabat, ainsi que plusieurs grandes villes du pays, ont été le théâtre, ce week-end, d’une vague de protestations inédites menées par un mouvement émergent baptisé “GEN Z 212”. Né sur les réseaux sociaux, ce collectif informel a rassemblé des centaines de jeunes autour de revendications claires , réformer le système éducatif, améliorer les services de santé publique et lutter contre la corruption.

Bien que les manifestations se soient déroulées de manière pacifique et ordonnée, la réponse des autorités a été immédiate et musclée , dispersion des rassemblements et interpellation de centaines de participants. Ce traitement a suscité une vague d’indignation, au niveau national et international, notamment en raison du contexte actuel où le Maroc cherche à renforcer son image de pays stable et ouvert en Afrique du Nord.

Que réclame la génération Z ?

Cette nouvelle génération, née dans un monde numérique en perpétuelle mutation, rejette les formes classiques d’engagement politique et refuse les discours institutionnels traditionnels. Son cri de ralliement , la dignité, la justice sociale et des perspectives concrètes pour l’avenir.

Les manifestants dénoncent la dégradation des services publics, l’augmentation du coût de la vie, le chômage chronique des jeunes diplômés, et surtout, une classe politique perçue comme déconnectée des réalités populaires. Nombreux sont ceux qui qualifient l’actuel gouvernement d’“aristocratique”, incapable de répondre aux aspirations de la population.

Contrairement à d’autres mouvements, “GEN Z 212” n’est ni partisan, ni idéologiquement structuré. Il s’agit d’un électrochoc citoyen porté par une jeunesse qui exige d’être vue, entendue et considérée dans la prise de décision nationale.

Une réponse sécuritaire qui fragilise l’image de l’État

À Rabat, les autorités ont interdit les rassemblements prévus et ont procédé à l’arrestation de dizaines de manifestants, parmi lesquels figuraient des étudiants et des militants associatifs. Une manifestation parallèle contre un projet de loi sur l’enseignement supérieur a également été empêchée.

Selon des sources locales, plus de 70 interpellations ont été enregistrées dans la seule ville de Rabat, et d’autres arrestations ont eu lieu à Casablanca, Tanger, Meknès et Taza. Si la majorité des personnes ont été relâchées par la suite, les images largement partagées sur les réseaux sociaux, montrant des interventions musclées, ont terni l’image des institutions et soulevé des inquiétudes quant au respect du droit de manifester pacifiquement.

Le silence du gouvernement face à ces événements n’a fait qu’alimenter la colère d’une partie de la population, en quête de réponses claires et responsables.

Crise de gouvernance ou crise des gouvernements ?

Ce mouvement ne se limite pas à une contestation de certaines politiques publiques. Il traduit un rejet plus profond de la manière dont le pays est gouverné. Beaucoup de Marocains estiment que le gouvernement actuel manque de légitimité sociale, qu’il est déconnecté du terrain, et qu’il n’a ni la volonté ni la capacité de répondre aux urgences sociales.

Dans ce climat de tension, de nombreuses voix appellent à une intervention directe de la monarchie pour rétablir la confiance, corriger les dérives, et empêcher que la situation ne dégénère, comme ce fut le cas lors du mouvement du 20 février en 2011.

Entre l’État et la rue… Qui guidera le changement ?

Le Maroc est aujourd’hui à un tournant critique. Recourir exclusivement à la répression pour répondre aux revendications sociales risque de creuser davantage le fossé entre la population et les institutions. Le temps est venu pour une approche audacieuse, inclusive et tournée vers l’avenir.

La jeunesse marocaine, telle qu’incarnée par “GEN Z 212”, refuse les promesses creuses et exige des actions concrètes. Elle appelle à un modèle de développement qui place l’humain, et non les chiffres, au cœur des priorités. Le dialogue ne peut plus attendre.

Dans ce contexte, un dialogue national sincère s’impose, capable de remettre à plat les priorités, de restaurer la confiance, et surtout, d’éviter que le mouvement ne soit récupéré ou instrumentalisé à des fins politiques.

L’heure de vérité

Le soulèvement de la génération Z ne doit pas être vu comme un simple accès de colère passager. C’est le symptôme d’un changement profond dans la conscience collective d’un pays jeune, connecté et exigeant. La grande question reste , le Maroc est-il prêt à écouter et à changer ?

La gestion des derniers événements est un signal d’alarme. Les décideurs doivent désormais comprendre que la légitimité ne s’impose plus par la force, mais par la capacité à répondre aux attentes du peuple. Le temps du silence est révolu. Le moment est venu de réinventer le contrat social.

 

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.