Sahara marocain : Guterres plaide pour le réalisme et recommande la prolongation du mandat de la MINURSO
Rim Mdaghri
Dans son rapport annuel au Conseil de sécurité sur la situation au Sahara marocain, le Secrétaire général des Nations unies, António Guterres, a recommandé la prolongation du mandat de la Mission des Nations unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO) jusqu’au 31 octobre 2026. Une recommandation qui s’inscrit dans un contexte marqué par la stagnation du processus politique et la poursuite des efforts diplomatiques du médiateur onusien, Staffan de Mistura, pour relancer les négociations.
Le rapport souligne les récentes démarches du représentant personnel du Secrétaire général , en septembre dernier, De Mistura a rencontré le ministre algérien des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, qui a insisté sur la tenue de négociations directes et sans conditions préalables entre le Maroc et le Front Polisario. De son côté, le ministre marocain des Affaires étrangères, Nasser Bourita, a réaffirmé la constance de la position marocaine, fondée sur l’initiative d’autonomie proposée par le Maroc en 2007, considérée comme une solution politique, réaliste et durable, dans le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale du Royaume.
Une dynamique diplomatique sous influence américaine
Le rapport met également en lumière l’intérêt croissant des États-Unis pour le dossier du Sahara. Le médiateur onusien a rencontré à New York Massad Boulos, conseiller américain pour les affaires africaines, qui a rappelé la position constante de Washington , le plan d’autonomie sous souveraineté marocaine constitue la seule solution crédible et pragmatique.
Selon l’analyste stratégique Hicham Moatadid, cette approche traduit « une prise de conscience au sein des Nations unies que la sortie de l’impasse passe par une démarche pragmatique et réaliste, alignée sur les paramètres fixés par les dernières résolutions du Conseil de sécurité ».
Il estime que « la mention explicite du rôle américain confirme la reconfiguration géopolitique de Washington en Afrique du Nord, avec une vision globale visant la stabilité du bassin méditerranéen et du Sahel. Le Maroc y est perçu comme acteur pivot du nouvel équilibre régional, tandis que la MINURSO reste un outil diplomatique de transition vers une solution politique menée sous légitimité marocaine. »
Entre réalisme diplomatique et tensions sur le terrain
Alors que le Conseil de sécurité s’apprête à voter le renouvellement du mandat de la MINURSO d’ici la fin du mois d’octobre, le rapport de Guterres détaille plusieurs incidents survenus à l’est du mur de défense.
La mission onusienne a fait état de tirs sporadiques du Front Polisario contre les Forces armées royales (FAR), et de prétendues frappes de drones marocains ciblant des positions du mouvement séparatiste. La plupart des projectiles recensés seraient tombés dans des zones désertiques sans causer de dégâts significatifs.
Un incident notable a été signalé près de Smara, où quatre roquettes sont tombées à proximité d’une position de la MINURSO, l’une d’elles à moins de 200 mètres de son équipe, sans faire de blessés. Guterres a exprimé sa « profonde préoccupation » et adressé une protestation officielle au Polisario, appelant une nouvelle fois à la cessation immédiate des hostilités.
Le défi de la neutralité onusienne et la responsabilité du Polisario
Pour Khalid Chiat, professeur de droit international et de relations internationales, le rapport du Secrétaire général « traduit la volonté onusienne d’avancer vers un règlement politique conforme au droit international », mais il évite de désigner clairement les responsabilités dans la rupture du cessez-le-feu.
« Le Polisario continue d’adopter une logique militarisée et non coopérative, documentée par la MINURSO elle-même. Or, l’absence de condamnation explicite de ces agissements risque d’entretenir une ambiguïté nuisible à la crédibilité du processus onusien », souligne-t-il.
Selon Chiat, « il est temps pour l’ONU d’adapter le mandat de la MINURSO à la réalité du terrain et à la nouvelle configuration internationale, en reconnaissant que le plan d’autonomie marocain demeure la seule voie politique sérieuse et applicable. Tout autre discours s’apparente à une forme de routine diplomatique déconnectée des réalités. »
Une mission onusienne fragilisée par les entraves du Polisario
Enfin, Guterres reconnaît dans son rapport les limitations opérationnelles de la MINURSO, notamment en raison du manque de coopération du Polisario, qui empêche la mission d’exercer pleinement ses fonctions de supervision et de médiation.
Parallèlement, il évoque la dégradation préoccupante de la situation humanitaire dans les camps de Tindouf, où les agences des Nations unies alertent sur une pénurie alimentaire aiguë, la malnutrition et le taux élevé d’anémie chez les femmes et les enfants.
Une résolution attendue sous le signe du réalisme
La prochaine résolution du Conseil de sécurité, attendue à la fin d’octobre, devrait reprendre les orientations du rapport Guterres, en insistant sur la continuité du mandat de la MINURSO et la primauté du dialogue politique fondé sur le réalisme et le compromis.
À mesure que le soutien international à la proposition marocaine d’autonomie s’élargit, la diplomatie du Royaume consolide sa position comme acteur central de stabilité et de coopération régionale, tandis que le Polisario et son parrain algérien apparaissent de plus en plus isolés dans leur logique de confrontation.