L’indépendance de l’Algérie, une cause marocaine

Par Bouchaib El Bazi

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À l’heure où l’histoire devient un champ de bataille idéologique, le film documentaire « L’indépendance de l’Algérie, une cause marocaine » vient rappeler une vérité souvent effacée des récits officiels , la libération de l’Algérie n’a jamais été une aventure isolée. Elle fut, dès ses origines, une cause commune, profondément enracinée dans la solidarité maroco-algérienne et portée par une fraternité forgée dans la lutte contre le colonialisme.

De la foi à la résistance : un combat partagé

La première partie du film retrace, avec rigueur et émotion, le long parcours de lutte commune entre les deux peuples frères, depuis 1830, date de l’occupation française de l’Algérie.

Dès cette année-là, les savants et notables algériens prêtent allégeance au sultan du Maroc, un geste symbolique fort qui traduit l’unité spirituelle et politique des deux nations.

Le documentaire évoque ensuite la création de la « Association des Étudiants Musulmans Nord-Africains » à Paris, qui fit connaître au monde la cause des peuples marocain et algérien, puis celle du Comité de Libération du Maghreb Arabe au Caire, véritable laboratoire de l’unité révolutionnaire, avant la naissance du « Armée de Libération du Maghreb », embryon d’un rêve d’indépendance collective.

Le film souligne également la solidarité du peuple algérien lors de l’exil du sultan Mohammed Ben Youssef, symbole de la souveraineté marocaine et de la résistance au colonialisme. À travers cette épreuve, les deux peuples se reconnaissaient dans un même combat pour la dignité.

Parmi les séquences marquantes figure l’évocation de la goélette “Dina”, débarquée à Nador, chargée d’armes destinées aux résistances marocaine et algérienne : un épisode qui incarne la fraternité dans le feu du combat.

Le Maroc indépendant : une base arrière pour la révolution algérienne

La seconde partie du documentaire éclaire une page souvent passée sous silence , celle du soutien actif du Maroc indépendant à la révolution algérienne.

Loin de considérer la libération de son voisin comme un enjeu extérieur, le Maroc en fit une cause nationale et stratégique, mobilisant toutes ses ressources pour en hâter l’issue.

Le pays devint littéralement la base arrière de la résistance algérienne. Des casernes marocaines furent mises à disposition pour la formation et l’armement des maquisards, tandis que le peuple marocain tout entier participa à une mobilisation financière sans précédent.

Le film illustre également la dimension diplomatique, médiatique, sportive et sanitaire de ce soutien , des journalistes marocains, des diplomates, des clubs sportifs et même des médecins se mirent au service de la cause algérienne. Le combat dépassait les frontières, tout comme l’espérance.

Mémoire retrouvée : les témoins du feu

L’un des moments les plus émouvants du film est sans doute l’interview du dernier survivant ayant participé au déchargement des armes de la “Dina” , un vieil homme dont la voix tremble encore du souvenir du fracas des vagues et du tonnerre des fusils.

Autre scène d’une grande portée symbolique , le leader Abdelkrim El Khattabi, figure mythique de la résistance marocaine, célébrant la Fête du Trône à Le Caire, image d’une unité maghrébine à son apogée.

Le film a également le mérite de raviver des lieux oubliés, témoins silencieux d’une épopée partagée , la radio “La Voix de l’Algérie” à Selouane, la caserne de Kaddbani, où furent formés plusieurs chefs de la résistance algérienne, ou encore la caserne de Touissit et une clinique de fortune dédiée aux blessés du combat pour la liberté.

Un film qui réveille les consciences

La force du documentaire réside autant dans la richesse de ses archives que dans le courage politique de son propos. À une époque où la mémoire se réécrit au gré des tensions diplomatiques, ce film rappelle que le sang versé dans les montagnes de l’Atlas et des Aurès était le même, et que la liberté de l’un ne pouvait se concevoir sans celle de l’autre.

En définitive, « L’indépendance de l’Algérie, une cause marocaine » n’est pas seulement un hommage à un passé commun ; c’est un acte de mémoire, une main tendue vers l’avenir.

Il redonne voix à une fraternité que les frontières ont voulu effacer, et nous rappelle, comme le dit un résistant dans le film .

« Nous combattions pour l’Algérie, mais nous rêvions d’un grand Maghreb… nous ne connaissions pas les frontières. »

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