Quand la diplomatie devient affaire privée : chronique d’un ambassadeur en eaux troubles
Majdi FZ : source Maghrebalam
Il y a des diplomates qui représentent leur pays avec honneur, et d’autres qui semblent représenter avant tout… leur propre carnet d’adresses.
Dans certaines ambassades, les couloirs sentent moins l’encens de la diplomatie que le parfum entêtant des affaires privées. On y parle plus souvent de yachts, de dîners discrets et de comptes bien tenus que de dialogue interculturel ou d’intérêt national.
Du militant à l’ambassadeur , la tentation du “moi, je”
Notre protagoniste, ancien ministre en charge de la diaspora, a gravi les échelons grâce à la confiance du pouvoir et à un vernis de militantisme progressiste. Mais une fois installé dans le fauteuil feutré de la représentation diplomatique, le militant s’est mué en stratège de salon, troquant les discours sur la solidarité pour des relations d’influence soigneusement entretenues.
Dans les soirées officielles, on l’entend encore parler de “défendre les intérêts des Marocains de l’étranger”.
Mais derrière le micro, le patriotisme semble parfois s’arrêter à la porte du banquet.
La diplomatie version jet-set On croyait autrefois que la diplomatie se jouait dans les chancelleries.
Aujourd’hui, elle se négocie parfois sur un yacht, entre deux verres de champagne et une poignée de mains bien calculée.
Des invitations croisées, des cadeaux « d’usage », quelques appuis politiques ici ou là — le tout enveloppé dans le ruban bleu du protocole.
Et quand certains diplomates semblent trop proches de milieux politico-économiques étrangers, la frontière entre l’entregent et l’ingérence devient… un peu floue.
Mais chut, c’est pour “renforcer les relations bilatérales”.
L’art d’utiliser la diplomatie comme une carte VIP
Il faut dire que certains ont compris avant tout le monde que le passeport diplomatique est le meilleur sésame pour voyager dans les zones grises du pouvoir.
Un poste à Bruxelles, un mandat prestigieux, et voilà que les intérêts privés se parent soudain des couleurs du drapeau national.
Pendant ce temps, les vraies questions — celles des Marocains de la diaspora, des entrepreneurs à bout de souffle ou des étudiants laissés pour compte — restent souvent sans réponse.
Mais il paraît que le budget de la mission est absorbé par des “frais de représentation”. À croire que la représentation diplomatique consiste surtout à… se représenter soi-même.
Une diplomatie à auditer
Tout cela pose une question sérieuse , qui contrôle les comptes des ambassades ?
Les budgets publics s’évaporent parfois dans des zones d’ombre où ni la Cour des comptes ni le Parlement ne semblent oser mettre le nez. La transparence diplomatique reste un concept aussi rare que les visas sans attente.
Si la diplomatie doit servir l’État, elle ne doit pas devenir le refuge des égos et des privilèges personnels.
Car la confiance royale, comme la confiance du peuple, n’est pas un chèque en blanc.
Morale provisoire d’un scandale permanent
Entre le faste des réceptions et le silence des registres comptables, une partie de notre diplomatie a oublié son devoir d’exemplarité. Et s’il fallait une réforme urgente, ce serait celle de l’éthique au service extérieur.
Car servir le pays, ce n’est pas se servir du pays.