Mali – Algérie : les djihadistes viennent-ils tous de Tindouf ?

Bouchaib El Bazi

À Bamako, l’heure n’est plus aux courbettes diplomatiques. Fini les « chers voisins » et les poignées de main en sommet panafricain , le Mali, qui fait face à un terrorisme coriace et à géométrie variable, accuse désormais ouvertement l’Algérie de jouer les sous-traitants officiels du chaos sahélien. Rien que ça. Et pour appuyer cette thèse, une source peu habituée aux fantasmes , les services de renseignement espagnols, relayés par La Vanguardia, mettent noir sur blanc ce que beaucoup chuchotaient dans les chancelleries , plusieurs djihadistes de l’État islamique au Sahel seraient… d’anciens pensionnaires des camps de Tindouf. Oui, ces mêmes camps « humanitaires » gérés par le Polisario sur sol algérien.

Quand la rébellion sahraouie se recycle en franchise islamiste

Il faut croire qu’entre les discours anti-marocains quotidiens, les ateliers de propagande anti-occidentale, et les sessions de nostalgie soviétique, certains jeunes sahraouis trouvent dans le djihadisme transfrontalier une reconversion plus lucrative et moins bureaucratique. Le renseignement espagnol parle de profils multilingues, formés, endoctrinés, puis exfiltrés en douceur vers les zones les plus inflammables du Sahel , Mali, Niger, Burkina Faso. Apparemment, le camp de Tindouf serait devenu une sorte de business school de l’extrémisme, sans frais d’inscription, avec bonus en kalachnikov.

Bamako ne mâche plus ses mots

Le gouvernement malien, lassé de compter ses morts et ses villages brûlés, ne prend plus de gants. Il accuse l’Algérie de tolérer – sinon d’encadrer – cette porosité dangereuse entre séparatisme et salafisme. Dans les couloirs feutrés de Koulouba, on parle de « transfert idéologique » , un glissement progressif du discours de rupture régional du Polisario vers un radicalisme religieux globalisé. En d’autres termes , quand on s’entraîne pendant vingt ans à haïr les frontières, il arrive qu’on passe à la vitesse supérieure.

Silence radio à Alger

Du côté algérien, le silence est assourdissant. Ni démenti officiel, ni condamnation des faits. Il faut croire que le logiciel diplomatique d’Alger, toujours bloqué sur la version « Guerre froide 1.0 », a du mal à gérer les bugs sahéliens. Les seuls communiqués sortis jusqu’à présent évoquent… le « droit à l’autodétermination du peuple sahraoui ». Oui, encore. Pendant ce temps, des ex-sahraouis exportent leur colère et leur maniement des explosifs vers Gao ou Tombouctou.

Le Polisario en mode startup terroriste ?

L’image d’Épinal d’un Polisario romantique, combattant le « colonisateur marocain » depuis les sables de Tindouf, semble avoir vécu. Aujourd’hui, certains de ses anciens membres dirigent des cellules armées de l’État islamique dans le Sahel, avec comme atouts , formation militaire, frustration identitaire, et carnet d’adresses algérien bien rempli. On est loin des discours de l’Union africaine.

Une base arrière qui dérange

Pour Bamako, la conclusion est claire , l’Algérie offre, volontairement ou par négligence, un havre logistique et idéologique aux extrémistes du désert. À l’heure où les troupes françaises ont plié bagage, où les Russes font la danse du ventre avec Wagner, et où les Nations unies évitent de trop regarder sous le tapis, ce genre de soupçons n’est plus une querelle de voisinage. C’est une alerte stratégique.

 

Ce que dit l’Espagne (et que l’Algérie évite de lire)

D’après La Vanguardia, plusieurs figures de l’EIGS (État Islamique au Grand Sahara) sont issues des camps de Tindouf. Parlant espagnol, arabe et français, ils occupent des postes de commandement sur les lignes de front sahéliennes. Ils sont suivis de près par les services ibériques depuis que certains réseaux de contrebande les relient à Melilla.

Peut-être qu’au lieu d’imprimer des tracts anti-marocains à longueur de journée, le régime algérien devrait songer à installer un détecteur de radicalisation à l’entrée de Tindouf. Ou, mieux encore, relire la Charte des Nations Unies. Au chapitre « paix et sécurité internationales ».

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