Gestion de l’espace aérien au Sahara : Rabat et Madrid avancent, Bouri­ta juge le statu quo « anachronique »

B - El Bazi

Alors que la coopération maroco-espagnole connaît un nouvel élan depuis la réconciliation de 2022, un dossier stratégique continue d’alimenter les discussions entre Rabat et Madrid , le transfert de la gestion de l’espace aérien au-dessus du Sahara. Aucune décision définitive n’a encore été annoncée, mais les négociations progressent, affirme le ministre marocain des Affaires étrangères, Nasser Bourita, qui qualifie le statu quo actuel « d’anachronique ».

Un dossier absent de la déclaration finale, mais bien présent dans l’agenda stratégique

Si la réunion de haut niveau, fraîchement achevée à Madrid, n’a pas mentionné explicitement ce dossier dans sa déclaration finale, il n’en demeure pas moins au cœur des échanges bilatéraux. Le contrôle de cet espace est aujourd’hui assuré par les autorités aéronautiques espagnoles, une situation héritée d’une configuration technique et politique remontant à plusieurs décennies.

Dans une interview accordée à l’agence EFE, Bourita a expliqué sans détour qu’il est incohérent qu’un vol reliant Marrakech à Laâyoune ou Dakhla soit partiellement géré par une tour de contrôle espagnole, alors même que la sécurité de l’appareil relève pleinement des autorités marocaines. Une dissonance qu’il qualifie « d’anachronisme » à l’heure où les deux pays affichent une volonté de partenariat stratégique et de normalisation totale.

Des négociations engagées et un groupe de travail en mouvement

Malgré le silence du communiqué final, Bourita assure que les discussions avancent. Il rappelle que le sujet figure noir sur blanc dans la déclaration conjointe du 7 avril 2022, qui avait marqué le début de la nouvelle phase dans les relations entre Rabat et Madrid. « Nous avons progressé (…) et le groupe de travail va se réunir bientôt pour faire avancer le dossier », affirme le chef de la diplomatie.

Ce groupe de travail, mis en place pour suivre les engagements communs, représente le cadre technique où s’analysent les implications opérationnelles du transfert. Car au-delà de sa dimension symbolique, la gestion de l’espace aérien touche à des aspects de sécurité aérienne, de connectivité régionale, de souveraineté technico-stratégique et de conformité aux normes internationales.

Une transition inscrite dans les engagements bilatéraux

Depuis la réconciliation de 2022, les deux pays s’étaient engagés à ouvrir des discussions formelles sur plusieurs dossiers structurants , gestion des espaces aériens, coopération sécuritaire, et surtout délimitation des frontières maritimes au large de la façade atlantique marocaine.

Sur ce dernier point, Bourita se dit confiant : « Il est possible de trouver des solutions de nature à préserver les intérêts de l’Espagne et les droits du Maroc ». Une phrase qui résume l’esprit de la nouvelle relation , ferme sur les principes de souveraineté, mais pragmatique dans la recherche d’accords mutuellement bénéfiques.

Un enjeu stratégique pour Rabat comme pour Madrid

Le transfert du contrôle aérien ne relève pas seulement d’une mise à jour technique ; il constitue un marqueur politique majeur dans la consolidation de la souveraineté marocaine sur son Sahara. Pour l’Espagne, il s’agit de concilier la modernisation des relations avec Rabat et la préservation de ses propres impératifs aéronautiques, notamment en matière de sécurité et d’interopérabilité.

Le dossier demeure sensible, mais les signaux envoyés par les deux capitales indiquent une dynamique constructive. Le consensus pourrait ne pas être immédiat, mais la direction semble définie , une transition progressive vers une gestion pleinement marocaine, négociée dans un cadre bilatéral apaisé et structuré.

 

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